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François Ozon adapte L’Étranger de Camus : une relecture contemporaine du classique absurde
Le cinéma français s’empare à nouveau du monument littéraire qu’est L’Étranger d’Albert Camus, avec une adaptation signée François Ozon, sortie en salles le 29 octobre 2025. Ce projet, longtemps considéré comme "inadaptable", a suscité une forte attente, tant pour sa fidélité au roman que pour son ancrage dans le contexte colonial algérien. Avec Benjamin Voisin dans le rôle de Meursault, le réalisateur propose une relecture à la fois sensorielle, historique et humaine, qui redonne vie à un personnage autrefois perçu comme un monstre d’indifférence.
Une adaptation longtemps jugée impossible
Pourquoi L’Étranger est-il si difficile à filmer ?
Camus, en 1942, a écrit un roman où le récit est raconté par Meursault, un homme qui, après avoir tué un Arabe sur une plage, est jugé non pas pour son acte, mais pour son manque d’émotion. La narration est froide, distanciée, presque mécanique. Cette absence de pathos, cette indifférence apparente, ont longtemps semblé incompatibles avec le langage cinématographique, qui repose sur l’émotion, le suspense, la psychologie des personnages.
« Adapter L’Étranger de Camus était un pari casse-gueule », a confié François Ozon au JDD, soulignant la complexité d’incarner un personnage dénué de réaction émotionnelle sans le rendre inintéressant.
Pourtant, Ozon n’a pas cherché à "humaniser" Meursault au point de le rendre sympathique. Il a choisi de le restituer tel que Camus l’a écrit, tout en insufflant une profondeur contextuelle que le roman laissait implicite. Le résultat ? Un film qui ne se contente pas de raconter une histoire, mais qui interroge le spectateur sur la justice, la mémoire et le colonialisme.
Les clés du succès selon les critiques : fidélité et contextualisation
Une relecture contemporaine, pas une simple copie
Les premières critiques, notamment celles de Le Monde, Télérama et La République du Centre, soulignent une double réussite du film : la fidélité au texte de Camus et l’ancrage dans le contexte historique de l’Algérie française.
« Dans “L’Étranger”, le cinéaste François Ozon fait de Meursault un homme qui ne nous est pas radicalement étranger », écrit Le Monde. « Il le rend humain, sans le justifier. »
Ozon a choisi de ne pas ignorer le contexte colonial, contrairement à certaines lectures antérieures du roman. Le film montre clairement les relations de pouvoir entre les colons français et la population locale, les tensions sociales, les silences de l’État. Le meurtre n’est plus un acte isolé, mais le produit d’un monde où la violence est banalisée.
Benjamin Voisin, dans le rôle de Meursault, incarne ce décalage émotionnel avec une précision troublante. Il ne pleure pas, ne s’excuse pas, ne cherche pas à se justifier. Et pourtant, on le suit. On comprend, sans l’approuver. On le voit, sans le connaître.
« Camus incarné à l’écran comme jamais », témoigne Télérama, qui souligne la performance magnétique de Voisin, capable de transmettre une émotion sans la nommer.
Les dernières mises à jour : du tournage à la sortie
Chronologie des événements clés
- 2023 : Annonce officielle du projet par Gaumont. François Ozon confirme son envie d’adapter L’Étranger, en citant comme inspiration son grand-père, qui a vécu en Algérie durant la période coloniale.
- 2024 (printemps) : Début du tournage en Algérie (région de Tipaza) et en France. Le réalisateur choisit de filmer sur les lieux originaux pour capter l’atmosphère du roman.
- Juillet 2024 : Premières images diffusées par AlloCiné, révélant une palette de couleurs chaude et contrastée, évoquant la chaleur étouffante du soleil algérien.
- 2 septembre 2025 : Présentation officielle du film en avant-première à Paris, avec la présence de François Ozon, Benjamin Voisin, et les producteurs.
- 29 octobre 2025 : Sortie nationale du film en France et en Belgique. Le film est sélectionné hors compétition à la Mostra de Venise, où il reçoit un standing ovation de 10 minutes.
« Ce n’est pas un film sur le colonialisme. C’est un film sur un homme qui ignore le monde autour de lui – et que ce monde le juge pour ça », a déclaré Ozon lors de la conférence de presse.
Le contexte historique et littéraire : pourquoi L’Étranger reste d’actualité
Un roman né dans la guerre, toujours pertinent aujourd’hui
Publié en 1942, pendant l’Occupation, L’Étranger est un ouvrage profondément engagé dans la philosophie de l’absurde. Camus y explore la condition humaine face à un monde dénué de sens, où les lois, les religions, les conventions sociales ne répondent à aucune véritable finalité.
Mais derrière cette dimension philosophique, il y a aussi un contexte politique et colonial. Le meurtre d’un Arabe, le procès, la médiatisation de l’indifférence de Meursault – tout cela reflète une société qui juge les autres non sur leurs actes, mais sur leur conformité aux normes.
« De “Maman est morte” à “J’ai tué un Arabe” : pourquoi il faut (re)lire “L’Étranger” d’Albert Camus », rappelle La République du Centre. « Ce n’est pas un roman sur un meurtre. C’est un roman sur la justice, la mémoire, et la manière dont nous percevons l’autre. »
Ozon a choisi de ne pas censurer cette dimension. Le film montre les inégalités raciales, les préjugés, les silences du tribunal. Le procès de Meursault n’est pas un procès de droit, mais un spectacle médiatique, où les émotions valent plus que les faits.
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